lundi 30 juin 2014

Du orange et des voiles. (Rotterdam et Kinderdjik 29 juin)

Après la messe protestante dans la petite ville (on se fond dans la masse, exit les touristes), direction Rotterdam. Après quelques difficultés à y parvenir (bouchons), nous entrons directement au Museum Boijmans van Beuningen, une pointure en peinture parait-il. Bien que Pierre soit assez septique sur les oeuvres plus modernes, nous apprécions de traverser les différents courants et les siècles en peinture.



Nous avions été étonnés par la ferveur des Belges, alors que dire des hollandais ? C'est jour de match dimanche et on le sait : tout le monde porte les couleurs orange de l'équipe ou du drapeau. T-shirt, cravate, chapeau, robe, lunettes, boucle d'oreilles, tongs, (tout vu !), ils se donnent, ils se donnent ! Pour le match, imaginez l'ambiance lors du but libérateur à 88' et du pénalty qui les sauvent... La folie ! D'ailleurs, nous préférons filer de la ville qui bouillonne, on a un peu peur pour notre Jumpy.
Et grand bien nous fasse ! Nous allons à Kinderdjik, la ville au 19 moulins. Pour y arriver, un faut prendre un pont au bout d'une route en montée, arrivés en haut : gloups, l'eau, pas de pont ! On ne comprend pas, on reprend la carte, pourtant les panneaux montrent la direction de l'eau, bizarre... Et voilà qu'on voit arriver le pont : c'est un bateau ! Baptême de l'eau pour notre Jumpy bien courageux.

Nous voilà donc aux 19 moulins en 360° au coucher du soleil : extraordinaire... Et nous dormons au pied de l'un d'entre eux. Belle carte postale.


Breda, Middelburg, Domburg - 28 juin

Nous passons la frontière hollandaise une semaine après notre départ et avec 738,6 km au compteur. Après une nuit au bord d'un bois et notre première séance de footing (un des défis de notre voyage, pour ceux qui n'aurait pas suivi - Coach Cyril, on est au taquet !), nous découvrons Breda, et son béguinage vraiment charmant (havre de paix où des femmes pourtant non consacrées vivaient en communauté au XVIIIème siècle ; typique de la région, plusieurs en Belgique et aux Pays Bas sont classés au patrimoine mondial de l'Unesco, dont celui ci). 


Les Hollandais ont la réputation d'être de fins jardiniers : nous ne pouvons que confirmer ! Les jardins sont très bien entretenus, les fleurs y sont nombreuses, colorées, les fenêtres sont décorées, et avec beaucoup de goût, souvent une petite table, des chaises, un banc viennent ajouter une touche romantique au tableau. 

Cap vers la mer, la même qu'à Oostende, mais un peu différente quand même car on a changé de nationalité. Arrêt à Middelburg où nous assistons fortuitement à un "battle" entre 4 orchestres de musique sur la place du village. A la fin, ils se mélangent et ne forment plus qu'un grand ensemble : sompteux ! (pensée aux musiciens de Mions).
A Domburg, c'est aussi la fête du village, concert, fête forraine, nous dînons sur la plage, puis nous rejoignons le monde au bar du village où le suspens est à son comble pour les tirs au but de Brésil-Chili : un avant-goût de l'engouement des hollandais pour le Mondial !


Des pins, du sable et des cartes. (Kalmthout, Turnhout - 26-27 juin)

Après ces premiers jours plutôt urbains, nous ressentons le besoin de nous rapprocher un peu de la nature : nous optons pour la réserve naturelle de Kalmthout, le long de la frontière avec les Pays Bas. Nous sentons la différence avec le Sud de la Belgique et les grandes villes : ici on ne parle pas français. Nous randonnons (20 km) dans un paysage de landes sablonneuses qui nous fait croire par moment être partis bien loin... Le soir, au calme sur le parking de la Réserve, nous sortons pour la première fois table et chaises (de Bidochons!) et mangeons dehors notre premier repas "cuisiné" : une omelette.


Le lendemain, nous prenons le parti de la bonne surprise en allant à Turnhout dont on ne sait pas grand chose (trop peu touristique pour être dans les guides), si ce n'est que c'est la "capitale de la carte à jouer". En effet, le ton est donné dès l'hôtel de ville : flottent le drapeau de la Belgique, de l'Europe et un étrange drapeau représentant les dame, roi, valet et as d'un jeu de cartes. Nous trouvons donc le Museum Van De Speelkaart (musée de la carte à jouer) dont nous sommes certainement les seuls visiteurs de la journée : collection de machines d'imprimerie, très intéressante expo temporaire sur les jeux de cartes pendant la première guerre mondiale, et nous apprenons donc que la ville de Turnhout est aujourd'hui le plus grand exportateur mondial de cartes à jouer (l'usine fabrique 600 000 jeux par jour). Nous nous arrêtons ensuite dans un magasin de jeux de société (et de cartes) où le vendeur très sympathique nous présente plusieurs jeux. Quand on lui dit qu'on commence un tour d'Europe, il nous dit : "Mais qu'est ce que vous faites à Turnhout ?!" C'est aussi ça, faire des détours...

Oostende, Brugge - 24-25 juin

Nous filons vers la mer du Nord, on nous l'avait dit marron, nous ne la trouvons finalement pas si moche en y plongeant les doigts de pieds (seulement). Arrêt à Oostende, ville balnéaire, 9 km de plage de sable blanc : nous lézardons (un peu), et comme les habitudes reviennent au galop, belle balade sur le front de mer. Pour notre première nuit sauvage et étrange (comprenez à l'étranger), nous nous arrêtons au bord d'un canal. Nous testons notre aménagement "douche" (un rideau et une bassine, ndlr) : parfait ! Le lendemain, nous prenons le petit déj' devant les pêcheurs (on avait pris leur "coin") : mieux qu'au cinéma (dixit Pierre). 



On nous l'avait dit. Tous les guides l'affirment. Et bien, pour faire comme tout le monde (et uniquement pour cela), on est tombés amoureux de Bruges. Nous avons le privilège de la découvrir un mercredi de fin-juin, forcément, ça aide parait-il. Les endroits les plus touristiques sont respirables et... admirables ! Nous décidons, poussés par un beau soleil, d'ignorer les musées, et de nous balader toute la journée, de nous perdre dans les ruelles, le long des canaux, autour des moulins, et d'avancer au hasard de nos envies : le luxe ! 


 

Le soir, nous sommes presque les seuls spectateurs du concert de Carillon du Béfroi (le plus grand d'Europe : 47 cloches), et ce soir là, c'est un français qui joue. On reconnait des airs de la chanson française "Comme d'habitude", "La bohème". Nous finissons la soirée par le match de la France (chauvinisme oblige). On dort au bord de la route, et on dort bien.



 BRUGGE : on est conquis !

lundi 23 juin 2014

Bruxels !

Nous voilà donc sur la route, premiers kilomètres réels même si le projet avance dans nos têtes depuis quelques temps déjà. 
Après une première étape à Lille chez Perrine, la cousine de Pierre où nous testons le Jumpy dans un environnement urbain, nous faisons route vers Bruxelles, où nous attendent Théo et Kenza qui y vivent, ainsi que les Blérots (d'autres amis de Pierre) qui nous ont suivis pour le week-end. 
Arrivés un 21 juin, il va sans dire que la bière prend le goût de l'été et de la musique. Concerts donc, friterie bien sûr (nous faisons d'ores et déjà le deuil de pouvoir manger à nouveau d'aussi bonnes frites), Manneken-Pis évidemment, et autres gaufres gourmandes. Le lendemain, le soleil provoque un pique-nique dominical où nous commençons à sentir que le peuple se prépare… A quoi ? A supporter les diables ! Match oblige, où le 1-0 déclenche l'hystérie générale : nous découvrons la fierté belge en dégustant frites (encore) et bières (toujours). 


Lundi, nous flânons dans les rues piétonnes parsemées de fresques (capitale de la BD), le quartier populaire des Marolles, la place du jeu de balle réputée pour sa brocante, découvrons soupes, "pistolets" (petits sandwichs, tandis que les gros sont nommés des "mitraillettes"), hareng cru (nous ne sommes pas loin de la Hollande). Nous nous arrêtons un peu plus longuement au sein du parlement européen où le musée "Parlementarium" nous permet de revenir sur l'histoire de la construction européenne. Et au hasard d'une impasse, nous trouvons la Jeanneke-Pis, attestant de la même manière que son homologue masculin du sens de l'auto-dérision des belges !

Nous prendrons la route demain vers la mer du Nord, Ostende et Bruges : ce sera cette fois ci pour de bon, le grand saut vers l'aventure, enfin surtout vers l'autonomie du Jumpy et l'absence de douches !

vendredi 20 juin 2014

Et alors, vous allez où ?

L’itinéraire choisi est le fruit d’une longue réflexion, mélange de nécessité, de volonté et d’envies ; de réalités et de rêves aussi. Il doit d’abord respecter la courbe des saisons. Nous partirons en juin, il est donc logique, et même indispensable, de parcourir le Nord en premier, à la faveur d’un climat plus doux en été. Nous franchirons le cercle polaire fin juillet. Le trajet redescend ensuite vers les pays de l’Est, traversés de fin août à fin septembre. Les pays Baltes seront découverts lors du mois d’octobre, avant une remontée sans doute plus fraîche vers l’Allemagne lors du mois de novembre. Enfin, le dernier mois sera consacré à l’Italie, où nous espérons un temps clément pour le mois de décembre.

Cet itinéraire nous est bien sûr personnel, et peut-être ne parlera-t-il pas à tous. Le choix d’éviter Oslo et Stockholm s’explique par le besoin de limiter les kilomètres en Scandinavie, et par l’esprit même du fourgon aménagé, parfaitement adapté aux paysages des fjords qu’il nous semble vital de longer plus longtemps. Aussi, nous n’oublions pas que ces capitales sont très faciles d’accès lors de prochains voyages, et leur découverte n’est que partie remise.

          Les pays de l’Est, que nous sillonnerons longtemps, nous attirent par leur nature encore sauvage et leur culture peu connue. La mer Noire marque la frontière sud-est de notre voyage, nous la toucherons en Ukraine (?) et en Roumanie.
La péninsule grecque sonne comme une évidence, ainsi que la côte croate – en hors saison, évidemment. Certains pays ne pourraient être qu’une anecdote, presque exotiques, comme la Moldavie, l’Albanie, mais nous prenons le parti de la bonne surprise.
A la place de Vienne et de l’Autriche, nous décidons de faire un saut de puce en Pologne, pour plonger dans l’Histoire en marchant vers Auschwitz. Les kilomètres auront la part belle en Allemagne, que nous traverserons presque entièrement. L’Italie sera aussi largement servie, il est peu dire que terminer notre périple au rythme de la dolce vitae nous fait envie.
Les grandes absentes restent la Grande Bretagne, à laquelle le format du fourgon aménagé correspond peut-être moins, et la péninsule ibérique, que nous connaissons déjà bien et que nous réservons à plus tard.  


Quatre roues, quatre jambes et un moteur

Le célèbre van Volkswagen reste une légende, même pour nous qui n’avons connu l’époque faste des hippies, nomades rebelles et insouciants. « Vivre d’amour et d’eau fraîche », un idéal bien utopique ! Cependant, l’idée d’une maison sur roues nous séduit, elle respire la liberté, est propice au vagabondage, et ne suppose pas un dénuement total qui, bien que présentant une philosophie alléchante, nous semble difficile pour un long voyage. Certains soirs, nous voudrons certainement être à l’abri de la pluie, en sécurité matérielle, dans un cocon rassurant et connu. D’autres, rien ne nous empêche de planter la tente ailleurs, ou d’accepter une offre d’hébergement lors d’une rencontre marquante.



Si un camping-car ou une caravane s’avère un choix trop ambitieux, un véhicule « passe-partout » semble idéal, plus compact, plus respectueux de l’environnement et de notre porte-monnaie. L’idée d’un fourgon aménagé s’est donc assez vite imposée. Pour répondre à nos contraintes financières, mais au-delà pour s’investir pleinement dans notre projet, nous avons décidé d’acheter un fourgon de type standard et de réaliser l’aménagement nous même, et donc de pouvoir le personnaliser selon nos besoins. Nous avons effectué l’isolation de la cabine, la réalisation d’un coin cuisine avec réchauds et évier, l’installation du couchage et l’intégration de rangements, tout en répondant à des normes de sécurité évidentes.



Bien plus que quatre roues, nous possédons surtout quatre jambes ! Le fourgon aménagé n’est que le moyen de rendre l’aventure possible. Nous n’oublions surtout pas que c’est à pied -- le plus simple, naturel, économique et écologique des moyens de locomotion, que nous profiterons de chaque escale. Notre imagination sera alors la seule limite !


Citoyens d'Europe

Faire le tour de l’Europe s’envisage d’abord naturellement comme le tour d’un continent, d’un espace géographique, comme pour vouloir toucher ses contours physiques. Profiter de sa diversité et de sa richesse naturelle : les mers Méditerranée, Adriatique, Baltique, Noire, du Nord ; l’océan Atlantique ; les massifs des Alpes et Scandinave, les Balkans, les Carpates, la grand plaine d’Europe du nord, les péninsules ibérique, italienne et grecque. Autant de paysages qui promettent surprise et émerveillement !
Ensuite, c’est une Europe aux mille facettes culturelles que nous voulons découvrir à travers ses habitants. Différentes civilisations, les influences latines, nordiques, le développement des grandes religions, lui ont forgés un caractère unique. Nous voulons apprendre les caractéristiques essentielles des sociétés européennes, et delà de leurs différences, nous rechercherons leurs valeurs communes, sur fond d’une forte « dimension européenne ».
Au-delà, l’Europe est marquée par l’Histoire : des grands empires grecs, romains, ottomans, aux Révolutions en passant par le mouvement des Lumières, mais aussi les grandes Guerres. Autant d’éléments qui l’ont façonnée, inspirée, construite. Autant d’hommes et de femmes qui ont œuvré à sa grandeur, à sa chute parfois, et qui en ont fait l’Europe dans laquelle nous avons grandi.

Aujourd’hui, l’Europe semble indissociable de l’Union Européenne, construite au milieu du XXème siècle afin d’unir les pays membres, d’empêcher de nouveaux conflits et faire face aux défis futurs. Elle est d’abord un espace économique commun permettant une libre circulation des humains et des marchandises, elle est maintenant une communauté politique à l’échelle du continent. Qui dit politique, dit citoyen. Alors, sommes-nous de jeunes citoyens d’Europe ? Nous voulons pouvoir l’affirmer en rentant.

Mais, pourquoi ?


Ce projet ne s’envisage pas comme une lubie, une parenthèse hors du commun, inattendue, presque folle. Ce n’est pas une tranche de vie qu’on pourrait détacher du reste, qui, une fois mangée, ne nous laisserait qu’un goût amer de nostalgie dans la bouche.
Ce projet s’inscrit pleinement dans notre vie, et nous suivra bien plus tard. Il sera pour nous un fil rouge, à la fois fondation, première pierre et aboutissement d’un idéal de vie. Une vie active, ouverte à l’Autre, sensible aux rencontres, respectueuse des différences.

Ce projet ne s’envisage pas comme un exploit mécanique, sportif, humain. Ce n’est pas une aventure extraordinaire, prétentieuse, déconnectée de la réalité, qui n’autoriserait pas les difficultés ni les erreurs de parcours.
Ce projet se veut réaliste, à la portée de nos compétences économiques, physiques, logistiques, à la lumière de notre motivation et notre engagement. Nous acceptons les détours géographiques, les escales temporelles, les déceptions humaines, les tensions relationnelles, les frustrations inévitables. Nous ne voulons pas d’une autoroute !

          Ce projet a la lourde tache et l’ambition d’être éthique et respectueux des hommes et des femmes que nous rencontrerons. Une avancée hors des sentiers-battus, bien plus lente que la plupart des voyages et que nous espérons bien plus vraie.

Et si on partait ?

Quitter nos appartements, nos boulots, nos forfaits téléphoniques. Lâcher le métro, le jardin des Tuileries, la pluie gris-souris. Envoyer en l’air nos habitudes, notre vrai lit, notre frigo bien rempli. Tout le monde en rêve. On veut pouvoir le raconter.
En regardant autour de nous, l’envie de découverte et d’aventure a creusé le chemin. Le père de Lison a fait le tour de la Méditerranée à vélo. Entre Europe et Afrique. Nous, nous prenons le parti d’explorer le Vieux Continent. Avant de partir plus loin, ne faut-il pas savoir d’où l’on vient ? Et puis, s’il est vraiment le plus vieux, ne faut-il pas commencer par lui ?

On est jeunes et on a soif de sa sagesse.

Il parait qu’il est riche, mais riche de quoi ? De son peuple, de son histoire, de son climat, de ses paysages, ou de tout à la fois ? Nous avons grandi avec l’idée d’une Europe économique et politique, nous voulons toucher ses frontières géographiques. Nous voulons trouver un sens à notre sentiment de citoyenneté européenne, réfléchir à une société en devenir et à ses valeurs. En étant actifs, solidaires et tolérants, nous voulons être de ceux qui construisent l’avenir de l’Union.
Pour tracer la route, nous choisissons de rouler. Un moteur, c’est la liberté. Nous voulons découvrir, mais ne jamais nous imposer. Nous restons libre de partir, de revenir, d’avancer à notre rythme, de dormir où bon nous semble. Nous voulons un chez-nous chez l’Autre, une bulle d’espace connue pour mieux apprécier l’inconnu. Cette aventure est aussi pour nous l’avant-goût d’une vie à deux et nous choisissons de préserver notre intimité. Nous aménagerons donc un utilitaire en carapace de tortue.
Nous voulons prendre notre temps, mais ne pas le déconnecter complètement de notre vie d’avant. Nous ne passerons pas notre vie sur les routes, il ne s’agit pas d’être déboussolés en rentrant. Nous optons pour une demi-année. Assez pour vadrouiller, pas trop pour s’éparpiller.
Nous serons obligés de faire des choix. Nous ne pourrons marcher sur le sol des 44 pays ayant l’intégralité de leur territoire sur le continent européen. A trop vouloir en faire, on ne fait rien du tout. Nous avancerons donc au rythme de nos envies arbitraires et de nos représentations subjectives.


A la croisée des chemins, des cultures, et des rencontres, nous avancerons ensemble non pas vers un endroit précis mais vers une manière de regarder l’Europe.