lundi 29 septembre 2014

Tranches de vie. - Roumanie, du 20 au 26 septembre

A la frontière, premier contrôle du voyage, le douanier tique un peu sur la carte d'identité de Pierre et lui demande confirmation : "Pierre?", serait-ce la différence entre sa photo et sa barbe actuelle ? Nous aurons aussi droit à un "Rien à déclarer?" en français dans le texte qui nous fera bien rire... après.

On a quand même un peu l'impression d'être des assistés ici : dans une pension (à défaut de camping dans les coins reculés en hors saison), c'est une dame qui a fait pour nous machines à laver et repassage pour un prix dérisoire ; à la station service, c'est un pompiste qui nous met l'essence ; au lave-voiture, c'est un monsieur qui bichonne Jumpy et plusieurs dames à la fois qui lui font briller la carrosserie à la peau de chamois...

On joue à Mario Kart sur les routes, à éviter trous, bosses, boue, charrettes (monnaie vraiment courante) et autres oies, poules, canards, vaches, moutons et chiens errants (qui prolifèrent ici), sans parler des animaux sauvages. Et comme la conduite des roumains ne fait pas vraiment éloge de la lenteur, c'est souvent une vraie boucherie sur le bitume...


On va vous faire aimer la Roumanie.

C'est pour Pierre la grande surprise du voyage, Lison s'y attendait un peu, et après 10 mois à travailler en roumain, elle avait hâte d'aller voir ça de plus près. Le résultat est lumineux, et cette semaine passée ici est sans doute l'une de nos préférées en terme de diversité et d'authenticité. Avancée hors des sentiers battus.

Dans le Maramures, à la frontière avec l'Ukraine, on découvre une vie rurale qui semble ne pas avoir changé depuis bien longtemps. Le paysage vallonné, les champs couverts de meules de foin, les troupeaux et leurs bergers, les charrettes comme véhicules, les chevaux comme tracteurs : dépaysement assuré. 


Dans les petits villages, les vieux et les vieilles aux fichus et robes longues s'alignent sur des bancs devant les maisons drapées de vignes. On nous fait de grands signes pour nous demander d'être amené au village suivant, et on est remerciés comme le bon Dieu quand on s'arrête. On vend au bord de la route sa récolte : pastèques, courges, pommes, baies, échalotes et oignons. 



Les apiculteurs épinglent leurs ruches dans un camion ou sur une remorque, et quand on s'approche, on y reste un moment le temps de tout goûter (des cuillères bombées !), de nous expliquer les vertus de chaque variété, parler du temps, de la famille. Le tout en roumain bien sûr (on a eu un peu de mal à expliquer notre voyage, Lison aurait eu plus de facilités à parler contraception ou tuberculose...)
Dans ce coin là, on trouve aussi de belles églises en bois aux peintures anciennes, dont plusieurs sont classées au Patrimoine Mondial de l'UNESCO (on va toquer à la maison suivante pour demander de nous ouvrir). 
Nous découvrons, seuls, le site archéologique du camp romain de Porolissum : l'amphithéâtre est particulièrement impressionnant dans le brouillard mystérieux.



Au centre du pays, en Transylvanie, on trouve à Sighisoara une belle citadelle construite au XIIIème siècle : rues pavées et maisons biscornues donnent des couleurs aux vieilles pierres.
Brasov, le centre attractif de la région proche du massif des Carpates, nous offre une soirée animée au rythme des musiques et danses traditionnelles, en dégustant sur de grandes tables en bois mititei et sarmale (petites saucisses et chou farci, servis avec du pain blanc, de la moutarde et de la bière). On dort au chevet de la forteresse, vue sur la ville imprenable...


Non loin, à Rasnov, une autre citadelle dévoile un panorama époustouflant du haut des 150 mètres de son éperon rocheux. A Bran, le château de Dracula est à vendre : 78 milliard de dollars, si quelqu'un est tenté...
Dans la vallée de Prahova, à Sinaia, la montagne nous gagne ! On prend le télécabine et on descend tout schuss sur nos pieds. (Vous remarquez l'investissement bonnets, les réveils commencent à être frisquet, les oreilles couvertes, c'est mieux - foi de bûcheron).


La région de Dobroudja est la porte de la mer Noire et du delta du Danube : 5800 km² mêlant îles sablonneuses, digues, forêts et marécages. On embarque avec Marius, les cheveux dans le vent, sur un petit bateau au gros moteur et nous glissons au milieu des peupliers, aulnes, saules. Nous sommes pourtant à la fin de la saison, mais surprenons au détour d'une liane ou d'un roseau des tas d'oiseaux. Magique !



vendredi 19 septembre 2014

Les charmes de Buda-Pest.


Budapest nous surprend par sa grandeur, son élégance, sa modernité. Souvent, au détour d'une rue, elle nous fera penser à Paris, on pourrait en effet tout aussi bien la qualifier de ville-lumière ! Pierre dira d'elle que c'est une capitale "copieuse", et il y a du vrai. Très riche en belles façades, corniches colorées, monuments fastueux, étals odorants (le paprika est omniprésent), petites places intimistes... Il doit falloir beaucoup de temps pour en faire le tour !


Le Danube, séparant la ville de Buda aux collines vertes et château somptueux et celle de Pest aux rues animées, s'étire paresseusement, à peine contrarié par des larges ponts qui relient les deux univers.



Mais c'est à la nuit tombée que Budapest nous offre la plus belle balade. Le long de l'eau, le Parlement s'impose, l'église Saint Mathias domine, le bastion des pêcheurs protège, la grande Synagogue médite, les ponts scintillent. Grandiose.


Héritage ottoman et tradition ancestrale dans cette ville aux 40 sources thermales, nous découvrons le plaisir des bains turcs, alternance d'eaux entre 18 et 40 degrés, nombreux saunas (aux plantes, colorés, traditionnels, doux...), et une piscine extérieure aux jets et bulles légères. Merveilleuse de nuit, illuminée, quand il fait froid dehors.
[Et la douche est comprise, et ça, ça n'a pas de prix.]

Hongrie - 12 au 19 septembre.


Ici, la pluie n'est jamais bien loin non plus, mais quelques éclaircies nous permettent de voir du paysage. A Lillafüren, les jardins en terrasses, les cascades, lacs et canaux éclairés par un rayon de soleil nous remotivent.



Nous découvrons un pays plus à la marge de l'Europe que nous l'aurions pensé, entré dans l'Union en 2004 seulement, au lourd passé soviétique. On paye encore en Florint et symbole d'un pays plus pauvre que la Pologne, 1€ = 314 Ft. On a des billets de 10 000 Ft ! La campagne est très reculée, nous croisons plus de charrettes et moins de tracteurs qu'ailleurs.

Nous traversons quelques grandes régions viticoles, la culture du vin est ici bien présente. L'Egri Bikaver fait la renommée de la ville d'Eger : envieux du courage que donnait ce breuvage aux soldats hongrois, les Turcs en buvaient en précisant que ce n'était pas de l'alcool mais du sang de taureau... Le Tokaj est un fameux vin blanc liquoreux, il parait même que Louis XIV disait qu'il est "le vin des rois, roi des vins".

Dans le massif des Matra (le Kekesteto est le point culminant à 1015 m d'une Hongrie plutôt plate), la forêt nous met à l'abri des gouttes la nuit. Mais le lendemain, c'est Paris-Dakar pour en sortir... Mais notre cher Jumpy et son vaillant conducteur forment une équipe qui trace sa route !



Parce que "réaliser ses rêves d'enfance est le meilleur moyen de vraiment rentrer dans sa vie d'adulte" (dixit un éminent philosophe montpelliérain), nous faisons une pause à Gödöllö à côté de Budapest, vaste château offert par l'Etat Hongrois pour le couronnement de l'empereur d'Autriche et roi de Hongrie, François-Joseph Ier et son épouse Elisabeth (Frantz et Sissi, quoi). Ils aimaient y passer des jours nature loin de la Cour de Vienne. Musée-mémorial à la gloire de Sissi, si chère au coeur des hongrois qui lui vouent aujourd'hui encore un véritable culte pour son grand coeur, ses convictions et son engagement pour le peuple.




Dimanche, c'est aussi la fête du village à Gödöllö, on se fond dans la masse : concert de Chantal Goya locale, stands de Lángos (beignet recouvert de crème aigre et de fromage râpé), de Kürtöskalács (long cylindre de pâte caramélisé saupoudré de sucre), jeux de kermesse animés par les Scouts (on va piquer des idées).


"J'ai pas perdu ma bonne humeur - meur - meur." Slovaquie. 10 - 12 septembre (!)


La Slovaquie sera, hélas, synonyme de frustration... Dans le massif des Tatras (frontière avec la Pologne), les montagnes devaient s'élancer vers le ciel et nous offrir de belles balades. Oui, sauf que les éléments sont contre nous et nous imposent trois jours (et nuits) d'une pluie incessante et d'un brouillard plus épais que jamais. Nous dormons au pied des télésièges, mais sans jamais voir le sommet.


L'ambiance n'est donc déjà pas folle, mais ajoutez à cela du hors-saison au fin fond d'une région très peu touristique, ça peut devenir carrément tristounet. Les coins sympathiques décrits par les guides tournent au ralentit, parfois même fermés alors que nous sommes que début septembre (pourtant classés !). Nous arrivons tout de même à visiter la grotte Domica, reflet des sous-terrains typiques de la région. Ouverte juste pour nous et en tête à tête avec la guide, balade impressionnante dans les entrailles de la terre qui nous offre des sculptures naturelles défiant la gravité et l'imagination. Stalactites, stalagmites et chauve-souris ponctuent la visite (souvenirs dans la tête, pas de photo).

A force de ne rien y voir, ayant déjà épuisé notre carte après-midi Monopoly, et les prévisions météo n'étant vraiment pas optimistes pour les jours suivants, nous hâtons notre départ vers la Hongrie. Allez, pour le plaisir : "il faudra revenir !"...




mercredi 10 septembre 2014

Auschwitz-Birkenau.


Pour la première fois, nous avons envie de raconter, mais ne trouvons pas les mots. 
Il faut voir, pour ne jamais oublier.
Nous préférons vous laisser la phrase du mémorial, traduite en 22 langues, celles des déportés, et attendre de vous voir en vrai pour vous faire part de notre émotion.

"Que ce lieu où les Nazis ont assassiné un million et demi d'hommes, de femmes et d'enfants, en majorité juifs de divers pays d'Europe, soit à jamais pour l'humanité un cri de désespoir et un avertissement."


Warsaw, la reconstruite, Kraków la romantique.


Il persiste entre ces deux villes une compétition ancienne. L'une capitale actuelle, la seconde souvent décrite comme capitale du coeur des polonais. Nous ne saurons trancher entre les deux, l'une comme l'autre méritant que l'on s'y arrête un peu.

Varsovie fut complètement rasée en août 44 par les Nazis suite à l'insurrection de son peuple. Elle témoigne aujourd'hui de l'opiniâtreté des polonais, qui, dès 1947, commencèrent à reconstruire entièrement la ville, sélectionnant le meilleur de chaque époque. Certains lui reprochent ainsi un certain manque d'authenticité, nous la trouvons, nous, bien belle avec ses rues pavées, ses remparts et ses façades colorées. Le charme du vieux, pimpant comme du neuf, en quelque sorte !





On joue à "ah, s'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi..." sur un parcours de bancs musicaux qui jouent du Chopin, franco-polonais. On ira même se cultiver à son musée.
Un photoplasticon d'époque a miraculeusement été conservé, permettant de voir grâce à un système de double lentille, les yeux dans des jumelles, de vieilles photos de la ville en 3D. Décalé - vieillot - hipster !


 

Cracovie, vendredi soir à la tombée de la nuit, s'anime à la lueur des bougies des nombreuses terrasses bondées, des spectacles de rues, des concerts dans les églises, des calèches d'antan. Au centre du Rynek, la place principale, une Halle aux Draps aux allures d'orient ajoute à l'attraction. Le château du Wawel, ancienne résidence des rois se pare de milles feux, les bords d'eau de la Vistule offre une balade romantique.



On compte ici en zolty (1€ = 4zl - l'euro sera pour 2016 vraisemblablement), on est riches ! Nous mangerons deux fois dans des bars à lait (Mleczny), sorte de cantine vestige de l'époque soviétique, qui nous permet de goûter la nourriture traditionnelle très bon marché (environ 10zl le plat, soit 2€50). Et le moins que l'on puisse dire, c'est que ça tient au corps ! 
Du goulasch, du bigos (choucroute aux pruneaux), de la soupe paysanne ou de betterave, des pierogi (raviolis fourrés à la viande, aux pommes de terre, au fromage ou aux épinards), des krokiety (grosse crêpe fourrée), des bublik (bretzel cracovien). On boit du Kompot, eau bouillie avec des fruits, et de la vodka évidemment !

Pologne. - du 1er au 10 septembre


Nous retrouvons la même heure qu'en France, mais plus à l'est, nous devons faire avec des journées beaucoup plus courtes. A 19h30, il fait nuit noire. 
Si les pays baltes offrent dès le 15 août un automne-champignon (comprenez bien humide), la Pologne nous gratifie d'un début du mois de septembre doré. On ressort les shorts, la crème solaire... et on pense très fort à la rentrée ! On mesure le luxe de cette année 2014, où le 1er septembre n'est pas, pour nous, (encore) synonyme de retour au quotidien.  
Courage, ami lecteur-travailleur !

On démarre notre traversée polonaise par la forêt de Bialowieza, à la frontière biélorusse, qui a été depuis les années 30 le lieu de réintroduction des derniers bisons d'Europe (le dernier avait été tué en 1917). 1000 bisons vivent aujourd'hui dans ces bois. Mais ils se cachent, nous nous contenterons de les voir dans la réserve, aux côtés de cerfs et biches, élans, sangliers et autres animaux de la forêt. (Les sangliers font un raffut incroyable avec leurs groins, tonton Jean Luc, on se demande comment tu fais pour ne pas les trouver ?!)


Tout au sud du pays, à Wieliczka, la mine de sel exploitée depuis le 13ème siècle fait partie de la toute première liste du patrimoine mondial culturel de l'UNESCO, avec le centre de Cracovie. 3 heures de visite jusqu'à 135 mètres sous terre, dans des galeries et chambres aux murs salés (la roche contient entre 60 et 96% de sel). 
On apprend le travail de ces mineurs, pénible bien sûr, mais quand même bien moins que leurs confrères travaillant le charbon (le sel est plus solide, moins d'effondrements, pas ou peu de coup de grisou, pas de maladies professionnelles... au contraire, puisqu'il y a carrément un centre de cure thérapeutique sous terre améliorant largement la qualité de vie des personnes asthmatiques notamment à raison de 3 semaines de cures, 6 h par jour dans la mine, tous les 2 ou 3 ans) - c’était la minute culturelle, ndlr.


On découvre aussi que les mineurs sont de véritables artistes, la mine étant décorée par leurs soins de nombreuses statues en sel. Une cathédrale, de très nombreuses chapelles, des salles de réceptions, de conférences cohabitent avec les galeries de travail.



Ici, nous marchons forcément sur les traces de Jean Paul II qui a tant marqué son pays et plus largement le 20ème siècle. Les rues, places, statues de Jana Pawla II pullulent. A Kalwaria Zebrzydowska, deuxième lieu de pèlerinage du pays, nous sentons la ferveur religieuse des polonais. A Wadowice, nous découvrons la maison natale du pape : la rose, la première à droite de la cathédrale où il a été baptisé.



L'actualité nous oblige à changer un peu notre itinéraire. En théorie, nous pourrions passer par l'ouest de l'Ukraine, qui n'est pas formellement déconseillé par le site du ministère de l'intérieur, mais nous ne sommes pas à l'abri d'une pause administrative plus ou moins longue à la frontière. Et en regardant de plus près tout ce que nous voudrions encore voir, considérant le temps qui passe (vite), nous faisons le choix du raisonnable.  
Courageux mais pas téméraires ! 
Nous descendrons donc vers la Roumanie en passant par le Slovaquie puis la Hongrie, que nous avions de toute façon prévu de traverser en remontant.